Arrivée en Haiti par la frontière terrestre à Jimani.
Formalités douanières dans un décor d'apocalypse avec Jimani en voie de submersion au bord de son lac : ambiance assez chaotique de fin du monde...
puis entrée progressive par la banlieue dans Port au Prince, ville blessée.
2 ans après, les gravas sont pratiquement déblayés dans les rues, donnant une impression de redémarrage, mais juste en arrière les batiments disloqués sont toujours là.
Les campements viennent de disparaitre (comment et pour où?....) donnant un peu de respiration au centre ville.
Il est à nouveau possible de se promener sur le Champ de Mars devant l'ancien palais présidentiel toujours écrasé, c'est l'occasion de la première aquarelle...
Accueillis par les marchands ambulants, je pose mon siège pliant contre un réverbère au bord de l'avenue, et c'est parti... Un petit attroupement commence à se former : les "blancs" assis sur le trottoir sont rares, mais le statut de peintre est très respecté : situation propice au débat (sport national) en créole qui s'engage.
La polémique grossit autour de moi et on pourrait même penser que les gens commencent à se disputer. Mais Pauline fait la traduction en simultané :
- poussez-vous, vous voyez bien que vous le génez, laissez-lui de l'air...
- mais le trottoir appartient à tout le monde, je vois pas pourquoi je devrais me pousser ...
- de toute façon si ça le génait il ne se serait pas mis ici, tu vois bien que c'est un artiste ...
- c'est un blanc qui ne craint pas de peindre parmi nous ...
- tu verrais un mulatre s'assoir ici toi?
- ....
Au fond, tout le monde est gentil, attentionné, cherchant à me protéger pour me permettre de travailler ...
Ouf.... J'en ai fini avec les ruines, maintenant j'ouvre les yeux ...
Pendant notre séjour à PAP, nous habitons dans une banlieue relativement épargnée par le séïsme, sur une colline à l'ouest .
La route, défoncée par l'eau qui dévale lors des pluies tropicales, nous mène à une maison parmi la végétation tropicale.
Grande et solide bâtisse qui accueille la famille largement élargie : frères, cousins et voisins du village natal de Gauthier. Une maison remplie surtout de garçons!
Nous nous y reposerons avec bonheur entre nos périgrinations ... et y apprendrons à vivre avec la chaleur, les moustiques et l'électricité capricieuse ...
Nous avons l'occasion de visiter de nombreuses maisons à Port-au-Prince. En général, les familles s'installent dès que les premiers murs sont montés, la maison se construisant cahin caha au fur et à mesure du temps... Habitats souvent très précaires, sans eau courante ni toilettes "confort moderne"... On trouve cependant de très belles maisons dans des quartiers fermés, comme celle-ci, propriété d'un médecin de la diaspora des Etats-Unis, où l'on a apprécié dans le jardin un délicieux poisson grillé accompagné de bananes pesées...
La presque totalité des ministères de PAP se sont effondrés ; toujours pas reconstruits, les services publics se sont tant bien que mal installés dans des bâtiments épargnés comme ici le Palais de Justice.
En Haiti, sous les tropiques, il n'y a pas que la peinture, il y a aussi la musique et le KOMPA qui se danse collé-serré devant les troubadours endiablés!!
Le vieil hotel Oloffson, belle construction coloniale en briques avec sa véranda en dentelure de bois, accueille tous les jeudi soir le groupe de musique RAM d'inpiration vaudou ; c'est l'occasion de trouver la jeunesse (dorée) de PAP, les "humanitaires" de toutes les couleurs, les prêtresses vaudou, les amateurs de "transe" et de punch !!!
Melting pot incongru dans le décor du roman de Graham Green "les comédiens" avec mobilier, sculptures, peintures, ...